La piqure de rappel de la Cour de Cassation concernant l’application de l’article 13 du règlement Bruxelles II bis : sa subsidiarité implique que l’enfant n’ai véritablement aucune résidence habituelle au moment de la saisine de la juridiction
Author : Margot GALUZET
Published on :
05/07/2023
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La Cour de Cassation a précisé, ce 1er juin 2023, les conditions d’application de l’article 13 du règlement Bruxelles II bis : il faut véritablement que l’enfant n’ait aucune résidence habituelle au moment de la saisine de la juridiction, rappelant ainsi le caractère subsidiaire de cette règle.
Le règlement Bruxelles II bis (et le règlement Bruxelles II ter, applicable depuis le 1er août 2022) est relatif à la compétence, la reconnaissance et l’exécution des décisions en matière matrimoniale et en matière de responsabilité parentale.
Ce règlement est un grand apport pour régir les relations entre les Etats, particulièrement en matière de responsabilité parentale dans le but d’assurer une certaine proximité avec l’enfant et, ainsi, mieux protéger ses intérêts.
La règle de principe est énoncée à l’article 8.1 du règlement : les juridictions de l’Etat membre sont compétentes si l’enfant réside habituellement dans cet Etat au moment de leur saisine.
Les mobilités intra/extra-européennes étant croissantes, il a fallu prévoir des règles en cas de changement de résidence habituelle de l’enfant.
Sur ce sujet, l’article 9 du règlement prévoit que sont compétentes les juridictions de l’Etat de l’ancienne résidence durant les trois mois à compter du déménagement dans le cadre d’une modification sur le droit de visite rendue avant le déménagement dans cet Etat.
D’autres situations sont plus complexes et ont pour conséquence que l’enfant n’a pas encore acquis de résidence habituelle. C’est le cas de l’enfant qui quitte un Etat vers un autre mais dans lequel sa présence n’est pas encore assez stabilisée pour que l’on puisse considérer qu’il s’agisse de sa nouvelle résidence.
L’article 13 intervient dans ce cas précis pour poser une règle de compétence résiduelle fondée sur la seule présence de l’enfant sur le territoire d’un Etat membre.
La Cour de Cassation a eu l’occasion de rappeler à quel point cette compétence était subsidiaire et était soumise à certaines conditions, dans un arrêt du 1er juin 2023.
En faits :
Un couple se marie en Espagne en 2006. De leur union naissent deux enfants.
La résidence familiale est fixée au Costa Rica, puis le couple se sépare en 2018. Le mari déménage en France tandis que l’épouse s’installe aux Etats-Unis avec les enfants.
En 2019, Monsieur saisit le Juge aux Affaires Familiales français d’une demande de divorce, lequel statue sur la question de la résidence des enfants communs.
Mécontente, l’épouse soulève une exception d’incompétence, qui est rejetée par les juges du fond.
Devant la Cour de Cassation, la mère invoque ce fameux règlement Bruxelles II bis, plutôt son article 13 en vertu duquel : lorsque la résidence des enfants ne peut être établie et que la compétence ne peut être établie sur l’article 12, les juridictions de l’Etat membre dans lequel l’enfant est présent sont compétentes.
En l’espèce, les enfants étaient présents sur le territoire espagnol depuis dix-huit mois, la cour d’appel aurait dû considérer que les juridictions espagnoles étaient compétentes, et partant, décline sa propre compétence comme l’exige l’article 17 du règlement.
La Cour, dans son arrêt du 1er juin 2023 rejette le pourvoi qui repose sur une interprétation erronée de l’article 13 : « l’article 13 prévoit ainsi une règle de compétence subsidiaire fondée sur la seule présence de l’enfant dans l’hypothèse où il s’avère impossible d’établir l’Etat dans lequel se trouve sa résidence habituelle ».
Par conséquent « ayant constaté que les enfants avaient leur résidence habituelle aux Etats-Unis au moment où le juge aux affaires familiales avait été saisi, la cour d’appel n’avait pas à procéder à une recherche sur l’application de l’article 13 du règlement Bruxelles II bis » et elle approuve les juges du fond qui ont rejeté l’exception d’incompétence internationale des juridictions françaises en application de l’article 14 du règlement (compétence résiduelle).
La Cour le rappelle donc : ce n’est qu’en l’absence de résidence habituelle que subsidiairement on se contente de la simple présence de l’enfant sur le territoire d’un Etat membre.
Cour de Cassation, 1ère, civile, 1er juin 2023, n°21-18257
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