Si tu me quittes, j’adopte ton enfant.
Published on :
01/06/2023
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La Cour de cassation affirme que le consentement à l’adoption de son enfant par son conjoint, donné par acte authentique conformément à l’article 348-3 du Code civil, s’il n’est pas rétracté dans un délai de 2 mois acquiert alors une validité illimitée dans le temps et ne se rattache à aucune instance particulière.
Dans cet arrêt du 11 mai 2023, un couple de femmes mariées, dont l’une a donné naissance à un enfant, souhaite que soit prononcée l’adoption de l’enfant par la conjointe de la mère.
Peu de temps après la naissance, la mère biologique donne alors son consentement à l’adoption plénière de son enfant par son épouse, dans un acte authentique du 18 février 2016 conformément à l’article 348-3 du Code civil.
Les conditions étant remplies, l’adoption est ainsi sollicitée auprès du tribunal judiciaire en avril 2016.
Cependant, en octobre 2016, alors que l’instance d’adoption est toujours en cours, la mère biologique retire son consentement à l’adoption par lettre envoyée au tribunal.
Par conséquent, l’épouse et candidate à l’adoption décide de se désister de l’instance, une décision de justice est venue constater ce désistement.
Parallèlement à ces désistements, un jugement en divorce a été prononcé suite à une instance initiée par la mère de l’enfant, puis frappé d’appel.
Bien qu’elle se soit désistée, et que la mère ait retiré son consentement, l’épouse de la mère décide de solliciter de nouveau l’adoption plénière de l’enfant.
L’arrêt de la Cour d’appel ici attaqué a fait droit à la demande de la conjointe de la mère en prononçant l’adoption plénière de l’enfant à son égard.
Devant la Cour de cassation, la mère biologique soutient que la rétractation de son consentement donné le 18 février 2016 par courrier adressé au tribunal en octobre 2016, suivi du retrait de son épouse de l’instance premièrement introduite, a eu pour effet d’anéantir l’acte du 18 février 2016. Ainsi, le dépôt d’une nouvelle requête en adoption par l’épouse de la mère biologique requiert à nouveau le recueil du consentement de la mère.
A cela la Cour répond qu’effectivement l’adoption plénière de l’enfant du conjoint requiert le consentement de celui à l’égard duquel la filiation est établie, et peut être rétracté dans un délai de 2 mois.
Qu’en l’espèce, le consentement de la mère biologique n’a été rétracté qu’après l’expiration de ce délai de 2 mois.
Ainsi le consentement donné n’ayant pas été retiré dans le délai imparti par la loi, et cette loi ne lui attribuant aucune limite dans le temps ni rattachement à une instance particulière, celui-ci est toujours valable et l’adoption plénière doit être prononcée.
Concernant l’effet de l’instance de divorce sur la procédure d’adoption en l’espèce, les juges de la Cour de cassation ont affirmé que « le juge doit vérifier si les conditions légales de l’adoption de l’enfant sont remplies au moment où il se prononce ».
Au nombre de ces conditions légales se trouve l’obligation pour l’adoptant et le parent d’être mariés, conformément à l’ancien article 345-1 du Code civil.
En l’espèce, le jugement de divorce avait été frappé d’appel, ainsi les épouses étaient toujours unies par les liens du mariage au moment où la Cour a statué.
* * *
Aujourd’hui cette question de savoir si le parent et le candidat à l’adoption sont mariés n’a plus à se poser.
En effet, l’adoption n’est désormais plus conditionnée au mariage depuis une ordonnance n° 2022-1292 du 5 octobre 2022 prise en application de l'article 18 de la loi n° 2022-219 du 21 février 2022 visant à réformer l'adoption, elle est désormais également ouverte aux partenaires de PACS et aux concubins.
On peut se demander si, par cette décision du 11 mai 2023, les juges de la Cour de cassation ne tentent pas d’interpeller le législateur sur cette question du consentement illimité.
En effet, avant l’introduction dans le droit français en 2022 de la possibilité d’adopter l’enfant de son partenaire ou concubin, le divorce permettait de mettre fin à toute possibilité d’action en adoption, peu importe que le consentement ait été donné et non révoqué dans un délai de 2 mois.
Désormais, dans le cas de l’adoption de l’enfant de son concubin, il n’existe à priori pas de moyen de mettre fin à la possibilité d’introduire une action dès lors que le délai de révocation de 2 mois après qu’il a été donné est dépassé.
Source : Cour de cassation - Première chambre civile — 11 mai 2023 - n° 21-17.737
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