Bienvenue à une nouvelle juridiction française : la Cour de Réexamen des Décisions Civiles

Published on : 23/04/2018 23 April Apr 04 2018

Créée par la loi de modernisation de la justice du XXIe siècle (Loi 2016-1547 du 16 novembre 2016, article 42), et intégrée au Code de l’Organisation Judiciaire dans les articles L 452-1 à L 452-6, la Cour de Réexamen des Décisions Civiles est une juridiction placée auprès de la Cour de Cassation pour apprécier la recevabilité d’une demande de réexamen d’une décision civile définitive, relative à l’état des personnes. La loi offre en effet à toute personne ayant été partie à l’instance et disposant d’un intérêt, le bénéfice d’un réexamen « lorsqu’il résulte d’un arrêt rendu par la Cour Européenne des Droits de l’Homme que cette décision a été prononcée en violation de la convention » (Code d’Organisation Judiciaire, Article L 452-1). La Loi conditionne cette faculté au cumul de deux autres conditions : Le réexamen doit être demandé dans un délai d’un an à compter de la décision des Juges strasbourgeois ou, à titre transitoire, à compter de l’entrée en vigueur de la loi pour la modernisation de la justice du XXIe siècle (dite « J 21 ») si la condamnation est antérieure. Il ne peut être fondé que sur une violation dont la nature et la gravité entraînent « des conséquences dommageables auxquelles la satisfaction équitable (...) ne pourrait mettre un terme ». * * * La Cour de Réexamen a rendu ses deux premiers arrêts, le 16 février 2018, et elle a statué en matière de gestation pour autrui, matière dans laquelle la France a brillé, pour ses condamnations régulières, devant la Cour Européenne des Droits de l'Homme. En effet, l’article 16 du Code Civil français frappe de nullité toute convention portant sur la procréation ou la gestation pour le compte d’autrui. A partir de ce point, la jurisprudence a refusé de retranscrire sur les registres de l’état civil français les actes de naissance d’enfants nés d’une mère porteuse à l’étranger. Ces enfants se trouvaient dans une situation impossible où il leur était refusé l’inscription sur les registres de l’état civil français, leur déniant ainsi le droit à une filiation en France. A plusieurs reprises, la Cour Européenne des Droits de l'Homme a condamné la France pour violation du droit au respect de la vie privée des enfants. La jurisprudence de la Cour de Cassation a alors évolué, pour considérer que l’existence d’une convention de mère porteuse ne faisait pas obstacle à la transcription d’actes de naissance étrangers, réguliers en la forme, et conformes à la réalité. Elle a même récemment admis la transcription de la mention de la filiation paternelle biologique et autorisé, sous respect des conditions légales, l’adoption par l’époux du père d’un enfant né d’une mère porteuse. Dans chacune des deux affaires portées devant la Cour de Réexamen, les actes de naissance des enfants nés de mère porteuse aux Etats-Unis et en Inde n’avaient pas pu être transcris sur les registres d’état civil français. La Cour Européenne des Droits de l'Homme avait écarté la violation du droit au respect de la vie familiale des parents, mais avait condamné la France pour violation du droit au respect de la vie privée des enfants (Cour Européenne des Droits de l'Homme, 26/06/2014 et 21/07/2016). La Cour de Réexamen a fait droit aux deux demandes de réexamen du pourvoi en cassation. Les juges de la Cour de Réexamen ont constaté d’abord que les requêtes ont été introduites dans le délai légal d’un an, et ensuite, la gravité des conséquences dommageables, due aux violations par la France du droit à la vie privée des enfants. Les juges se sont assurés enfin que les dommages subis par les enfants n’avaient pas cessés, malgré la satisfaction équitable, c'est-à-dire une indemnisation en argent, accordée par la Cour Européenne des droits de l’Homme. Le réexamen des décisions internes a été autorisé devant l’assemblée plénière de la Cour de Cassation. Il reste donc à attendre un arrêt de cette assemblée plénière qui fera, souhaitons-le, droit à la demande des enfants de transcription sur les registres d’état civil français de leur acte de naissance étranger.

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