Légataire particulier cherche légataire particulière !

Author : Jean-Michel CAMUS
Published on : 04/07/2023 04 July Jul 07 2023

Il est à craindre que les parties qui ont subi l’arrêt rendu par la Première Chambre Civile de la Cour de Cassation du 21 juin 2023 n’aient guère envie de chanter.

En effet, la décision qui a été rendue par la Cour de Cassation, si elle apparaît être d’une orthodoxie juridique implacable, leur semblera bien amère.

La situation est la suivante :

Une personne, aux termes d’un testament, s’est vue gratifier d’un legs particulier, portant sur un immeuble dont elle était entrée en possession du vivant du testateur et s’y était maintenue après son décès.

Après le décès, les enfants du testateur tentaient de faire valoir que l’action en délivrance des legs était prescrite et, conséquemment, réclamaient au légataire particulier une indemnité d’occupation et la restitution des loyers perçus.

La Cour de Cassation considère que le légataire particulier doit procéder à la délivrance de son legs pour entrer en possession, juridiquement, du bien légué.

Le légataire qui est entré en possession du bien avant le décès du testateur qui se maintient après, doit quand même procéder à la délivrance de son legs.

Il s’agit d’application stricte de l’article 1014 du Code Civil.

La question qui se posait était également celle de la prescription et la Cour de Cassation considère que, depuis la réforme des successions de 2006 et de la prescription de 2008, la prescription est quinquennale.

A partir du moment où l’action en délivrance de legs, qui n’aurait pas été exercée, dans les 5 années du décès, est prescrite, le légataire n’entre pas en possession, les héritiers réservataires peuvent récupérer le bien et solliciter le remboursement des fruits de la chose léguée, c’est-à-dire des loyers.

On ne saurait donc trop conseiller aux légataires particuliers, à défaut de trouver une légataire particulière, faire procéder à la délivrance de son legs, soit par un acte notarié avec l’accord de tous les héritiers, soit, à défaut de cet accord, par une action en justice, qu’il serait bien inspiré d’engager dans les meilleurs délais et, en tout cas, moins de cinq ans après le décès.

Cour de Cassation Première Chambre Civile 21/06/2023, n° 21-20.396,
Jurisdata n° 2023-01018

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