Possible révocation d’une donation pour adultère…mais pas n’importe quel adultère !

Published on : 30/12/2017 30 December Dec 12 2017

Un homme se donne la mort le 7 août 2011. Ses enfants issus d’un précédent mariage assignent l'épouse de leur père, au motif qu'elle le trompait, afin d'obtenir la révocation de la donation entre époux au dernier vivant qu'il lui avait consentie plusieurs années auparavant. L'article 953 du Code civil n'autorise la révocation des donations entre vif que dans certains cas et notamment pour cause d'ingratitude. L'article 955 précise que l’ingratitude peut notamment consister en une « injure grave ». L’article 212 du Code civil pose une obligation de fidélité pesant sur chacun des époux. On pourrait dès lors raisonnablement penser que le non-respect de cette obligation légale, quelques soient les circonstances entourant cette violation, constituerait une injure grave au sens de l’article 955 du Code civil.
Toutefois, l'arrêt rendu le 25 octobre 2017 par la première chambre civile de la Cour de cassation vient au contraire approuver la Cour d'appel d'avoir examiné précisément les conditions dans lesquelles est intervenu la tromperie afin de déterminer s’il y a ou non « injure grave » entraînant la révocation de la donation. En l'espèce, c'est parce que l'épouse avait trompé son mari avec un ami proche du couple, que cela avait suscité des rumeurs dans le village où le couple vivait et que l'époux avait vécu très douloureusement ces rumeurs et les tensions que l'attitude de sa femme avait engendrées entre eux que l'adultère est qualifié d'injure grave. Autrement dit, si l'adultère était intervenu dans un couple plus enclin à la liberté relationnelle de chacun et que l'adultère n'impliquait pas un ami du couple, il n'y aurait pas injure grave alors même qu'une obligation légale de fidélité serait pareillement mise à mal. Cet arrêt semble ainsi amoindrir considérablement l'obligation conjugale de fidélité en différenciant un adultère que l'on pourrait qualifier de « classique » d'un adultère « aggravé », seul ce dernier étant une injure grave. Une telle position est regrettable. Cour de cassation, Première chambre civile, 25 octobre 2017, N°16-21.136

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